La Francisque du marquis

La date du 11 octobre 1942 était censée être marquée d’une pierre blanche pour l’Emsav. En effet, ce jour-là, à l’occasion d’un fastueux jubilé à Rennes, le « maréchal des Français » fait remettre par le préfet Jean Quenette la Francisque à Régis de l’Estourbeillon, « marquis des Bretons pour ses quarante ans de lutte bretonne »[1]. Là s’exprime donc à la fois le credo régionaliste de Vichy mais aussi, d’une certaine manière, l’aboutissement de quatre décennies de combats politiques pour le dirigeant de l’Union régionaliste bretonne (URB). Mais si la mise en scène est savamment organisée, elle demeure ambigüe et, en définitive, ne parvient pas à masquer les dissensions, tant au sein de l’Emsav qu’à l’extérieur du reste. En examinant la manière dont la presse, en Bretagne tout particulièrement, traite de ce jubilé, il s’agira d’essayer de déterminer comment l’opinion – pour délicate d’emploi que cette notion soit – s’accorde des revendications régionalistes en cet automne 1942, alors que tous les yeux sont braqués sur Stalingrad.

Il y aurait énormément à dire sur cette journée de commémorations et sans doute pourrait-elle bénéficier d’une enquête à part entière, autrement plus charpentée que ce modeste billet. Pour autant, il me semble important de souligner que bien que se plaçant dans une configuration politique nouvelle, née de la Révolution nationale, cette manifestation renvoie à des pratiques anciennes. Inutile, bien entendu, de rappeler ici ce que la Francisque doit à la Légion d’honneur : la chose est évidente. Plus subtiles sont en revanche les lieux choisis pour cette mise en scène. Il y a bien entendu la cathédrale, édifice dont la portée idéologique n’échappera pas à grand monde et sur laquelle il n’est sans doute pas plus utile de s’attarder. Sauf pour rappeler, à la suite de Florian Le Roy, que c’est là où, autrefois, « l’on sacrait les ducs »[2]. Il y a des manières plus équivoques de poser une généalogie et, sous couvert de Francisque, c’est bel et bien un trône symbolique qui est offert ce jour-là au marquis de l’Estourbeillon. En revanche, on pourrait dire deux mots de l’Hôtel de France où se tient l’assemblée générale de l’Union régionaliste bretonne. On pourra certes invoquer un parc hôtelier d’autant plus restreint qu’il faut de surcroît loger les troupes d’occupation. Mais il n’en demeure pas moins que cet établissement accueille depuis des années les personnalités en visite à Rennes, à l’instar par exemple du général Boulanger en juillet 1888. Même remarque en ce qui concerne la « matinée artistique » organisée au théâtre, cette salle étant depuis des années habituée à recevoir de tels spectacles, y compris folkloriques.

En 1924, à Quimper, le marquis Régis de l'Estourbeillon prête fidélité à la Bretagne. Carte postale. Collections Musée de Bretagne : 991.0175.3.
En 1924, à Quimper, le marquis Régis de l’Estourbeillon prête fidélité à la Bretagne. Carte postale. Collections Musée de Bretagne : 991.0175.3.

À Rennes, le quotidien de la rue du Pré-botté confie dès le 10 octobre 1942 à Léon Le Berre, figure de l’Emsav connue sous son nom bardique Abalor, le soin de présenter aux lecteurs de L’Ouest-Éclair la personnalité dont on célèbre le jubilé[3]. Et pour celles et ceux qui s’interrogeraient quant à la ligne éditoriale de ce journal, la première page en donne un bon aperçu : alors que « la Réunion [est] menacée à son tour par les Anglais », la rédaction se félicite des succès nazis sur « cinq divisions rouges », et non pas soviétiques, toute en expliquant que « au conseil des ministres M. Laval expose la nécessité de hâter le recrutement de la main d’œuvre pour l’Allemagne ». Très hagiographie, pour ne pas dire qu’il verse purement et simplement dans le culte de la personnalité, ce portrait de Régis de l’Estourbeillon sous la plume d’Abalor vaut plus pour ce qu’il dit de son adhésion au régime que par les éléments biographiques qu’il prodigue. En effet, à travers la figure du marquis, ce sont bien des revanches qui sont prises, revanche non pas contre cette Allemagne avec qui la politique de collaboration est désormais engagée mais sur la République, à commencer par le centralisme et les lois laïques. Dans ce cadre, la langue tient, comme toujours, une place éminente et permet de revenir sur le combisme. On le voit, derrière le paravent culturel et folklorique, c’est bien un projet politique qui est mis en avant avec cette Francisque à l’occasion de ces 40 années de présidence de l’Union régionaliste bretonne. Or, non seulement Abalor ne craint pas d’exposer aux lecteurs de L’Ouest-Éclair ce programme idéologique mais croit bon de préciser que celui-ci est, depuis l’origine, le même. C’est dire donc si la fenêtre d’opportunité qui s’ouvre avec Vichy constitue une revanche sur Marianne, ce qui par la même occasion met en lumière la dimension fondamentalement antirépublicaine de ce discours. D’après Abalor, « ces revendications, les mêmes qu’il y a 40 ans, exposent que, dans le cadre de l’Unité Française, la Bretagne attend l’instauration d’un régime de liberté, un régime respectant ses traditions, ses coutumes, assurant l’enseignement de sa langue et de son Histoire en lui rendant la part d’autonomie administrative compatible avec l’indivisibilité de la France ». Puis de rappeler, pour mieux prendre à partie le lecteur, le programme de l’Union régionaliste bretonne au moment de sa fondation : « conquête de l’école par la langue, statut administratif provincial, production économique et artistique de la région, petites industries, relations transatlantiques, maintien des coutumes et des costumes, enfin développement de la personnalité bretonne sous toutes ses formes ».

Sûr de son fait, Abalor ne craint pas d’affirmer que là « est encore la vérité aujourd’hui ». Difficile dans ces conditions d’interpréter le chapitre concernant les relations transatlantiques, autrement dit avec les États-Unis. S’il faut très certainement y voir l’ombre portée des frustrations des rêves évanouis de prospérité nés de la Grande Guerre, voir des fantasmes wilsoniens relatifs à la liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes[4], doit-on y déceler une volonté délibérée d’ignorer la Charte de l’Atlantique et la preuve de la conviction que Washington finira par basculer dans le camp de Vichy, et donc de Berlin, face à Moscou ? Autre détail croquignolesque, Abalor prend bien soin de rappeler que le marquis voit le jour et grandit à Nantes, citée présentée comme la « ville ducale », mais ne dit rien du détachement de la Loire-Inférieure de la Bretagne décidé par Vichy l’année précédente. Sans doute faut-il y voir une preuve supplémentaire de ce que cette réunification, qui aujourd’hui constitue le cœur de doctrine des mouvements bretoniste, n’émeut alors pas particulièrement l’Emsav, à l’exception notable toutefois de L’Heure bretonne. S’il est bien question de « l’amputation du Nantais » dans le portrait dithyrambique que publie Abalor, celle-ci est imputée à Étienne Clémentel et ses groupements économiques régionaux institués en 1919. Là encore, la mémoire et son indissociable corolaire, l’oubli, sont les outils politiques du temps présent et sans doute est-il plus facile pour les militants d’aujourd’hui d’attribuer la « séparation » au maréchal Pétain qu’à un homme politique la IIIe République désormais connu de seuls quelques érudits.

Sous la plume de Florian Le Roy, lorsque vient le temps de rendre compte aux lecteurs de L’Ouest-Éclair des cérémonies du 11 octobre, qualifiée de « belle journée d’union », Régis de l’Estourbeillon devient une sorte d’idéal-type renvoyant à une Bretagne éternelle, ce qui implique que la province revienne à un status quo ante 1789[5]. Le marquis est ainsi « le type même de notre noblesse d’ancienne extraction, enracinée dans le sol, vivant du sol », réalisant ainsi la synthèse quasi parfaite avec la Révolution nationale puisque l’on connaît les fameux propos du maréchal Pétain pour qui « la terre, elle, ne ment pas ». Marianne a vécu et, pour Florian Le Roy, dans la voix de Régis de l’Estourbeillon, « simple et mordante quand il le fallait, on retrouvait celle de ces gentilshommes de nos neuf évêchés qui apportaient aux États de Bretagne l’accent et les attitudes de leur terroir ». Toute trace de conflictualité a disparu et comme dans une vision idéalisée du temps jadis, où le peuple aurait été unanime derrière son seigneur, ce jubilé offre à l’en croire l’image de « toute la Bretagne communiant dans un acte d’affection et de foi, sans distinction de parti ni de classe sociale ». Il est vrai que le marquis incarne, à en croire Florian Le Roy, à peine moins hagiographique qu’Abalor, les « vertus bretonnes », à savoir « la ténacité, l’endurance, la fermeté dans les opinions ».

Défilé de l'Union régionaliste bretonne à l'occasion du congrès tenu en 1937 à Quimperlé. Collections Musée de Bretagne : 992.0077.508.1.
Défilé de l’Union régionaliste bretonne à l’occasion du congrès tenu en 1937 à Quimperlé. Collections Musée de Bretagne : 992.0077.508.1.

Sans doute y aurait-il d’ailleurs lieu de s’attarder sur le rôle très particulier de Florian Le Roy lors de ce jubilé. Car s’il ne compte pas parmi les autorités officielles présentes sur scène en ce 11 octobre 1942, il n’en est pas moins une figure qui compte au sein de l’Emsav, une véritable autorité représentante de la haute-Bretagne et du pays gallo récompensée d’ailleurs quelques semaines auparavant pas une place au comité directeur de l’Institut celtique de Bretagne[6]. Mais cela ne signifie pas que Florian Le Roy soit mis de côté ce jour-là, bien au contraire. En rendant compte de cette manifestation dans L’Ouest-Éclair, il endosse l’habit du témoin mais dans une optique qui ne doit pas leurrer tant, en définitive, il s’agit là de dérouler le « projet culturel de Vichy ». Dans ce cadre, le folklore tient une place essentielle en tant que « pourvoyeur des nostalgies du passé » car, comme le rappelle fort justement l’historien C. Faure, ici, « le point de regard n’est pas celui de l’ethnologie, mais de l’idéologie ». Dans ce cadre, l’enseignement de la langue – en Bretagne le breton bien évidemment mais en ce qui concerne spécialement Florian Le Roy le gallo – est fondamental en ce qu’il contribue « à attacher l’homme à sa terre ». Les costumes, nécessairement « traditionnels », deviennent pour leur part une sorte d’uniforme renvoyant à un espace mythifié « où toute différence de classe est abolie » puisque « la province devient un lieu de paix sociale ». Là est en définitive, pour reprendre le concept forgé par C. Faure, le « style Pétain » qui, en matière culturelle, est éminemment folklorique[7].

On a parlé plus haut de sacre et, effectivement, à en juger par les personnalités présentes en la cathédrale de Rennes en ce jubilé il y a tout lieu de se demander s’il n’y pas une certaine forme de serment d’allégeance porté au marquis… de même qu’à son suzerain. C’est ainsi que L’Ouest-Éclair mentionne le préfet régional Jean Quenette ainsi que les préfets d’Ille-et-Vilaine Émile Bouché-Leclerc, des Côtes-du-Nord Jacques Feschotte et du Morbihan Paul-Émile Grimaud. Seul manque à l’appel donc le préfet Maurice Georges pour le Finistère ainsi que Philippe Dupard pour la Loire-Inférieure, département dont on a vu plus haut qu’il relève d’une situation particulière. À côté de ces autorités préfectorales, Florian Le Roy signale notamment la présence de François Chateau, maire de Rennes, d’Edgar de Kergariou, maire de Lannion et d’Alexandre Lefas mais aussi des bretonistes Joseph Martray , Pierre Mocaër, Raymond Delaporte et Yann Fouéré ainsi que de l’abbé Perrot et de l’historien Barthélémy Pocquet du Haut-Jussé, nommé par Vichy sur une chaire d’histoire de la Bretagne à la faculté des Lettres de Rennes. C’est dire donc si l’assistance est œcuménique.

Jeu de timbres associant la francisque, emblème du régime, et ds portraits du maréchal Pétain. Collection particulière.
Jeu de timbres associant la francisque, emblème du régime, et ds portraits du maréchal Pétain. Collection particulière.

Pour autant, il convient de se garder des mésinterprétations puisque l’allégeance ne saurait être complète. La présence du préfet Quénette ne doit en effet pas induire en erreur puisque l’on ce qu’il en est de la réalité du régionalisme vichyssois. Quant à la nébuleuse Breiz Atao, elle évolue par bien des égards en dehors du cadre Français et l’allocution prononcée par Raymond Delaporte, au nom du Parti national breton, doit être relativisée. Quoi que l’on dise, l’union bretonne réalisée ce jour-là n’est pas si complète qu’affirmée, y compris du point de vue de l’Emsav. En effet, la Francisque décernée au marquis est une décoration que le régime « réserve aux grands serviteurs du pays »[8], ce qui suppose que la Bretagne reste dans le giron français. Rendant compte du jubilé du marquis, L’Heure bretonne ne parvient pas à ne pas se contredire. Car si ce journal, qui publie en première page le discours de Raymond Delaporte, affirme que ces manifestations montrent « l’unanimité bretonne », c’est pour concéder dans le même temps l’existence de certaines « nuances de l’opinion bretonne »[9]. Quant à la Francisque remise au marquis, elle fait l’objet d’une remarque pour le moins cinglante qui dit ce qui sépare le PNB de Régis de l’Estourbeillon et de Vichy : « N’est-ce pas dans Flaubert qu’il est question d’une petite médaille décernée à un demi-siècle de servitude ? »[10]

À Lorient, cette causticité n’est assurément pas de mise et Le Nouvelliste du Morbihan s’en distingue, tant sur le fond que sur la forme. Non seulement ce jubilé n’est évoqué qu’en quelques lignes, certes en première page, mais cette remise de Francisque donne lieu à une toute autre interprétation, reprenant d’ailleurs par bien des égards les mécanismes de « gigognes patriotiques » en vigueur sous la IIIe République : « Cet hommage officiel du Chef de l’État français fit la plus profonde impression sur l’assistance, car il était la preuve de l’intérêt très vif que porte à notre petite Patrie et à ses enfants, dont il apprécie le courage et l’esprit de sacrifice, le soldat magnifique entre les mains duquel la France a remis son sort et dont elle attend le salut »[11]. Même chose à Saint-Brieuc où Le Moniteur des Côtes-du-Nord publie un court article en première page revenant en quelques lignes sur cette manifestation, sans évoquer la Francisque mais en insistant bien sur l’ambiance du jour décrite comme « l’union étroite des esprits et des cœurs, avec la participation de toutes les autorités civiles et religieuses du pays »[12]. On pourra certes invoquer les restrictions de papier et la pagination réduite de ces titres qui imposent des choix éditoriaux drastiques. Mais en réalité, cet aspect semble avoir peu d’incidence sur le traitement de l’événement. Si le Nouvelliste de Vannes est encore plus prolixe, la teneur est la même et ce journal explique d’ailleurs que ce jubilé s’achève par un patriotique dépôt de gerbe au Panthéon rennais[13]. On mesure de la sorte l’écart existant entre un discours célébrant les morts bretons pour la France pendant la Grande Guerre, puis celle de 1939-1940, quand bien même fussent-ils 240 000 en 1914-1918, et la rhétorique déployée par la nébuleuse Breiz Ato. Encore une fois, peu importe le nombre, ce qui compte pour ces militants c’est d’affirmer qu’ils sont morts par la France, et non pas pour.

Ces quelques réactions glanées, çà-et-là, dans la presse généraliste montre la fracture qu’il y a entre ces journaux et ceux émanant de l’Emsav. Profitons d’ailleurs de l’occasion pour rappeler qu’aucun des titres de la presse nationale disponible sur Retronews, à l’exception notable des Ondes – un hebdomadaire présentant les programmes radiophoniques et donc ceux du poste Rennes-Bretagne qui, justement, évoque ces manifestations dans le cadre de son décrochage local – ne dit le moindre mot de ces manifestations fastueuses. Faut-il y voir une limite du discours régionaliste de Vichy ou, ce qui par ailleurs n’est pas incompatible, la preuve qu’une telle actualité n’est considérée que comme pouvant intéresser qu’à l’intérieur d’une Bretagne à 5 départements ? Il n’est pas aisé de répondre à une telle question puisqu’à Nantes, si Le Phare de Loire est muet quant à ces cérémonies, tel n’est pas le cas de l’édition locale de L’Ouest-Éclair qui prend toutefois bien soin de ne pas évoquer la loi du 19 avril 1941[14]. Quant au Finistère, dont le préfet, on l’a vu, est absent lors de ces manifestations, il présente de ce point de vue un panorama qui n’est pas nécessairement évident à lire. À Morlaix, Yann Fouéré ne dit pas grand-chose de ce jubilé dans La Bretagne et préfère se focaliser sur la création du Comité consultatif de Bretagne, instance au sein de laquelle il sert. Mais il ne manque toutefois pas l’occasion de dénoncer ces « quelques extrémistes isolés pour lesquels la position actuelle du Parti National Breton et de son chef parait encore trop modérée !… » avant d’ajouter, définitif : « Mais cela ne compte guère en face de l’accord profond de la Bretagne sur quelques réformes essentielles que le Comité consultatif de Bretagne doit définir et préparer, afin que le gouvernement les réalise au plus tôt pour le plus grand bien de la Bretagne et de la France »[15].

En réalité, seule La Dépêche de Brest, pourtant réduite à deux pages, adopte une ligne éditoriale transgressant cette stricte dichotomie. Comme L’Heure bretonne, mais il est vrai en des termes beaucoup plus feutrés, ce journal critique vertement la conférence prononcée par Barthélémy Pocquet du Haut-Jussé : « Si nous avons, avec un vif plaisir, écouté le docte exposé du brillant élève de l’école des Chartes, nous noterons cependant à regret que le portrait qu’il nous brossa d’un Nominoë disciple de Charlemagne, le tableau qu’il nous fit de l’interpénétration constante tant artistique, littéraire et économique que militaire de la France et de la Bretagne, celui des sentiments comparés qu’il prête aux Bretons à l’égard du continent français et d’une de leur sœurs insulaires ont étonné dans l’assemblée des cœurs bien français, mais aussi bien bretons »[16]. Faut-il voir dans ce propos la marque de Yann Fouéré, aux manettes depuis quelques mois de la Dépêche de Brest ? Le contraste avec le portrait publié à Brest par René Cardaliaguet en première page du Courrier du Finistère est frappant et, en définitive, la chose est d’autant plus probable que l’article n’est pas signé[17]. Pour autant, on est en droit de se demander ce que le lecteur lambda de ce quotidien a pu saisir de cette controverse historiographique. Sans doute faut-il avant tout déceler dans ces quelques lignes la marque d’un Emsav plus que jamais incapable de s’adresser à d’autres personnes que ses propres militants et, en définitive, empêtré sur la voie du naufrage vichyste et de la radicalisation cumulative. Il est en effet frappant de constater qu’aucun de ces articles n’essaye même de convaincre le lectorat d’une adhésion du public à ce jubilé. Seuls sont évoqués les notables et les personnalités qui assistent à ces cérémonies, comme si la rupture avec l’opinion était déjà, plus ou moins inconsciemment, consommée.


[1] « Quarante années d’action bretonne », L’Heure bretonne, 3e année, n°118, 17 octobre 1942, p. 2.

[2] Le Roy, Florian, « Le Jubilé de M. le Marquis de l’Estourbeillon », L’Ouest-Éclair, 44e année, n°16672, 12 octobre 1942, p. 3.

[3] Abalor, « On fête à l’URB une belle figure bretonne : M. de l’Estourbeillon », L’Ouest-Éclair, 41e année, n°16671, 10 octobre 1942, p. 3.

[4] Sur ce point « Quarante années d’action bretonne », L’Heure bretonne, 3e année, n°118, 17 octobre 1942, p. 1 affirme que « dans la France triomphante de 1918 le Marquis de l’Estourbeillon, s’adressant à la Conférence de la Paix, demandait à Wilson d’appliquer à tous, y compris à la Bretagne, sa formule du Droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ».

[5] Le Roy, Florian, « Le Jubilé de M. le Marquis de l’Estourbeillon », L’Ouest-Éclair, 44e année, n°16672, 12 octobre 1942, p. 3.

[6] « L’Institut celtique de Bretagne a élu son Bureau », L’Ouest-Éclair, 43e année, n°16565, 8 juin 1942, p. 3.

[7] Faure, Christian, Le Projet culturel de Vichy, Lyon / Paris, Presses universitaires de Lyon / Éditions du CNRS, 1989.

[8] Le Roy, Florian, « Le Jubilé de M. le Marquis de l’Estourbeillon », L’Ouest-Éclair, 44e année, n°16672, 12 octobre 1942, p. 3.

[9] « Quarante années d’action bretonne », L’Heure bretonne, 3e année, n°118, 17 octobre 1942, p. 1.

[10] « Quarante années d’action bretonne », L’Heure bretonne, 3e année, n°118, 17 octobre 1942, p. 2.

[11] « La Francisque au Marquis de l’Estourbeillon », Le Nouvelliste du Morbihan, 56e année, n°237, 16 octobre 1942, p. 1 ; Thiesse, Anne-Marie, Ils apprenaient la France. L’exaltation des régions dans le discours patriotique, Paris, Editions de la Maison des sciences de l’homme, 1997.

[12] « On Fête à Rennes le Jubilé du marquis de Lestourbeillon (sic !) qui, depuis quarante ans, préside l’Union régionaliste bretonne », Le Moniteur des Côtes-du-Nord, 73e année, n°42, 17 octobre 1942, p. 1.

[13] « Le Jubilé de M. de l’Estourbeillon », Le Nouvelliste de Vannes, 18 octobre 1942, p. 1 et 2.

[14] « Le Jubilé de M. le Marquis de l’Estourbeillon président de l’Union Régionaliste Bretonne », L’Ouest-Éclair (édition de Nantes), 44e année, n°16 672, 12 octobre 1942, p. 3. La source ne permet pas de savoir si, comme à Rennes, c’est Florian Le Roy qui écrit l’article se rapportant à cet événement.

[15] Fouéré, Yann, « Création d’un Comité consultatif de Bretagne », La Bretagne, 2e année, n°488, 14 octobre 1942, p. 1-2.

[16] « Les Fêtes du jubilé du marquis de L’Estourbeillon président de l’Union régionaliste bretonne », La Dépêche de Brest, 56e année, n°21 285, 12 octobre 1942, p. 1.

[17] « Le marquis Régis de l’Estourbeillon », Le Courrier du Finistère, 63e année, n°3289, 17 octobre 1941, p. 1. À Quimper, Le Progrès du Finistère ne dit pas un mot de ce jubilé.


OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Erwan Le Gall (18 avril 2025). La Francisque du marquis. Ar Brezel. Consulté le 11 mai 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/13rz7


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